vendredi 5 décembre 2014

Porto - Cadiz

Entros mar e serra....
Remplis de bains d'écume bouillonnante, de plages jonchées de poissons échoués et de crépuscules incendiaires, la balance penche, le déséquilibre s'installe... nous voici en manque de montagne, de fraîcheur, de pierres et de verts.
Petite pause dans le centre agréable de Viseu avant de gagner le pied de la Serra d'Estrella. Les maisons blanches de Gouveia, adossées à la colline, nous accueillent pour la nuit, sur un promontoire dominant la plaine, avec un soleil las de se coucher, léchant négligemment la plaine avant d'échouer dans l'Océan


Viseu



Gouveia
Une route sinueuse nous emmène sur les crêtes, immenses crânes dégarnis dont les rares cheveux ont été brûlé par les incendies, légion dans la région. Les bergers édentés, une demi-douzaine de chevrettes à leurs basques, confèrent rapidement à ce paysage peu enthousiasmant charme et saveur.
Passé les crêtes chauves, nous basculons dans une belle vallée glaciaire, la Vallée de la Zêzere, plongeons directement sur la petite ville de Manteigas, étincelante de blancheur dans le soleil du soir.

Manteigas
Vale do Zêzere

De la Serra d'Estrella, la montagne des étoiles, nous garderons en mémoire les magnifiques balades dans une nature sauvage, intacte.
Vale do Rossim, superbe lac reposant dans son écrin de sphaignes vertes qui habillent les berges de noir en se décomposant, se mêlant au rouge profond des algues et rappelant l'Islande. Des rochers noirs sculptés par la fonte des anciens glaciers plantés ça et là....
Vale do Rossim



Porço del Inferno, où pierres et plantes s'entremêlent, avant de nous faire échouer dans une forêt de châtaigniers nous offrant plusieurs repas, pour nous mener, en fin de balade, au pied d'une cascade généreuse...


Porço del Inferno



La "beech route", magnifique, entre points de vue sur la vallée, chapelles, observatoires-incendies, forêt de hêtres... et surtout ses châtaigniers centenaires aux fruits gigantesques. Des bergeries en ruine ou encore habitées, trois poules, trois choux, un figuier, un cognassier et un pommier pour seuls compagnons. Une balade-senteur au travers de bouquets de lavande, de romarin et de menthe. Un milieu d'une beauté saisissante, ou plutôt pleine de charme, n'ayant de spectaculaire que cet embrouillamini d'odeurs et de couleurs qui chatouillent nos sens. Le tout dans une chaleur caniculaire.








Le plus haut sommet du Portugal, quant à lui, le Torre, rallongé par un obélisque pour atteindre les 2000 mètres n'a rien de séduisant. Plat, venteux, trois installations de ski gonflées de fierté se tordant dans le vent...


Torre


Le jardin de rochers noirs érodés, sur la route du Torre, donnant sur une plateforme piquée de cairns géants nous retient plus longuement, le coucher du soleil y étant une fois de plus spectaculaire.








La petite ville de Manteigas et sa place du marché a été notre camp de base pour la découverte de cette région. Petit clin d'œil à Heidi et Jean-Claude, un couple Lucerno-Vaudois d'Entlebuch que nous avons eu la chance de croiser dans la ville, et avec qui nous avons partagé de chouettes moments d'échange s'effilochant dans la nuit, autour d'un verre. Ils nous font rêver, eux qui ont vendu leur chez-soi pour arpenter le monde depuis leur retraite, il y a deux ans, de cela.

De la Serra d'Estrella et de ses alentours, outre les balades, nous garderons encore en tête l'atmosphère des petits villages agrippés à la colline, vieillissant avec leur population, leurs femmes ridées belles dans leur âge, engoncées dans leur fichu noir. Des villages sortis d'un autre temps....
Comme Sabugueiro, plus haut village du Portugal, presque mort mais pas tout à fait, les rires des enfants montant en cascade de la cour de l'école du village redonnant vie à ces ruelles peuplées de dames en noir au sourire vieillissant.


Sabugueiro
Et Piódào, en bordure du parc, splendide village du bout du monde, relié à Foz d'Egua, hameau aux ponts de pierre pittoresques par un sentier bucolique, longeant des flancs de côteaux sculptés en terrasses, sur lesquelles souffle une petit air népalais.


Piodao



Eucalyptus





Puis c'est à nouveau la plaine, verte et vallonnée.
Une route sinueuse dans la pénombre du soir. Caracol accroché aux phares du bus scolaire crachant sur le trottoir des petites crevettes à couettes cachées derrière leur cartable, la nuit qui tombe, les gens rassemblés, leurs traits animés sous le halo des réverbères, les quartiers pleins de vie. 
Avó, puis Barril de Alva. Coup de cœur. Une aire pittoresque au bord de la rivière.
Le maire en personne nous salue le lendemain matin, avec une jolie louche en bois sculptée pour cadeau. Nous voulions rester une nuit, nous sommes finalement restés quatre jours, la bouche pleine, les yeux remplis.



Baril de Alva

Balades le long de la rivière dans une forêt de mimosas, échanges sympathiques avec la fédération de camping-caristes portugais rassemblés le weekend-end à Barril de Alva.
Marché villageois, variations sur le thème du cochon, saucisses, filets, boudins et plus encore, fanfare barillinaise s'époumonant sur du Queen's, un chef d'orchestre factice imbibé d'alcool battant la mesure dans l'ombre fâchée du vrai, la "Torrée", feu de joie autour de châtaignes succulentes cuites selon la tradition. Festin des sens!
Et en prime, de belles soirées avec une famille de français.... pas comme les autres, de bleu! et presque Suisses. Valérie, Fred et Ted, sans oublier Lili, Titi et Bibi. Un art de vivre, une belle philosophie...Une retraite à 50 ans et toute la vie devant eux.














Difficile de savoir, qui du cochon, du maire ou des français nous aura retenu le plus longtemps. Toujours est-il que nous quittons Barril de Alva la tête pleine, armés d'une liste exhaustive de superbes emplacements pour se poser la nuit.... et la carte routière croûlant sous les nouveaux "incontournables" surgis au détour des apéros. Nous qui venions de barrer x destinations sur notre carte, histoire de bouster un peu Caracol et avancer!

C'est donc vers l'Est que nous nous échappons, et non plein sud, comme prévu initialement.
Escapade à l'intérieur des terres, descente au sud en zig-zag, tant pis, l'Algarve attendra, qui nous regarde ricocher contre les frontières, terre et mer. Impossible d'ignorer l'Alentejo et ses forêts d'écorchés, immenses étendues de chêne-liège et d'oliviers, ses bergeries, ses vaches, ses cochons et ses chevrettes, ne trompant personne sous ses faux airs de savane. Impossible de passer outre ces vieilles pierres... Ruines, dolmens, mégalithes, châteaux, monastères, bourgs médiévaux luisant de blancheur. Le tout dissimulé dans les broussaille ou juché sur les collines.

Conimbriga, cité romaine fondée par les Celtes, étape majeure sur la route reliant Lisbonne à Braga, au Ier siècle. Conimbriga et ses mosaïques splendides et bien préservées.
Ruines romaines de Conimbriga



La jolie ville de Tomar et son imposant Convento de Cristo, siège portugais des Templiers, où s'entremêlent des styles architecturaux très différents.

Tomar
Couvento del Christo




Barragem de Póvoa.
Arrivée de nuit au Barragem de Póvoa sous les courbettes déjantées des chênes-lièges articulés par un vent tempêtueux. La pluie bat la tôle, le ballet commence. Le lendemain matin, un froid glacial et un ciel bleu d'encre nous accueillent au bord du lac. Ça sent la neige. Nous troquons jupettes et shorts contre polaires et soft-shell.... et n'en continuons pas moins de grelotter.
Barragem de Póvoa. Un superbe camp de base pour visiter les villages médiévaux environnants. Avec en sus des balades sur les berges du lac, au crépuscule, à la recherche de la loutre, qui nous laisse sur le sable empreintes et carcasses d'écrevisses prometteuses... autant de vains messages codés.
Les écrevisses sont à la fête le lendemain à l'aube, déambulant, mécaniques, dans les lits de rivières, tandis que roupille la belle après avoir fait bombance.








Les villes médiévales.
Castello de Vide et son château, le donjon dont l'écho fait vibrer l'imaginaire des filles qui jouent à Raiponce, à Elsa et Anna. Son bourg médiéval pittoresque, éclatant de blancheur, d'où semble s'écouler une vie simple mais sereine. La nature environnante, vallonnée, luxuriante, qui nous offre de beaux points de vue sur le village.






Marvaó l'inattaquable, village médiéval perché sur un piton rocheux, au chemin de ronde attrayant dans la lumière du matin, à seulement 10 kilomètres de la frontière espagnole. Chemin de ronde le bonnet vissé sur la tête, dans un froid vif. 
L'après-midi, nous cherchons vainement des mégalithes le long de la  frontière espagnole, autant de croix jetées sur une carte douteuse. Tant pis, les oliveraies sont belles, les chênes-lièges somptueux, charmeur, le ballet céleste des merles bleus et pies bleues. Le pique-nique est goûteux, le soleil doux après le bref intermède hivernal.

Marvao







Chênes-lièges
 


Riches de ces belles images, nous traçons jusqu'à Lisbonne. Une centaine de kilomètres, une grosse journée pour nous, l'occasion de faire école.

Lisbonne.
Un enchevêtrement de venelles sombres, d'azulejos et de lierre grimpant les façades, de trams-way vieux bois rouges et jaunes, de conversations animées au coin des bars, de terrasses, de ruelles pavées abruptes....
Un fouillis de maisons colorées, jaunes, blanches roses et bleues, trapues ou effilées, rutilantes ou décadentes.

Lisboa











Bélèm
Lisbonne qui nous aura retenu plus longtemps que prévu bien malgré nous...
Notre vitre avant a éclaté en sans doute plus de mille morceaux. Défoncée à coups de pavés sur le parking du zoo. Ils auraient au moins pu forcer la même vitre que les précédents. Rien de bien grave, si ce n'est les tracasseries habituelles, une vague de froid qui souffle dans notre maison... et l'obligation de quitter notre jolie jetée du bord du Tage, à Bélem, pour le camping de Lisbonne, dans l'attente de la réparation.
Il va peut-être falloir installer une alarme.... ou faire-semblant... ou ajouter un autocollant "Rothweiler club" -ou en acheter un vrai!- ou encore décoller le CH. 
Vive le cambriolage! Comme tout ennui a son pendant positif, cette halte forcée nous a permis de rencontrer au camping de Lisbonne Pascaline, François, et leurs enfants Gilles et Inès, du même âge que Zoé et Loïse. Les enfants sont à la fête, ils mangent, jouent et dorment parmi. Nous aussi, on est ravi de partager expériences et repas.
Recrudescence du temps quotidien consacré à l'école au camping de Lisbonne.... et la lessive est faite!
Les filles jubilent. Enfin, on est posé et on ne fait rien! On réalise qu'elles ont besoin de pauses, que nos rythmes sont différents.






Nous quittons le camping avec une vitre flambant neuve. Petite pause au Cap Espichel, baignant dans la lumière du soir. Traversée du Rio Sado en bac, dans l'espoir de voir nager et sauter devant nous une troupe de dauphins.... en vain. Nous avons beau scruter l'horizon.... rien de rien.
Cabo Espichel



Péninsule de Troia et Rio Sado

Un temps mitigé nous accompagne sur les routes du sud. Ciel noir d'encre fissuré ça et là, laissant suinter un soleil éclatant faisant vibrer le magnifique Parque Natural do Sudoeste Alentejana et la Costa Vicentina baignés de couleurs et ambiances euphorisantes.


Réveil à Porto Covo



Vila Nova de Milfontes

Les chênes-lièges torturés laissent place aux mandariniers, orangers et citronniers.
Un coucher de soleil de bout du monde nous accueille au fort de Sagresh, où nous nous posons pour la nuit. Heureuse surprise: nous retrouvons Giovanni et Huguette, rencontrés à Lisbonne et renouons avec la tradition de l'apéro social et pas seulement familial!

Le Sud, l'Algarve, ce sont non seulement les célèbres falaises et et les somptueuses criques, mais également la foule. Après des semaines de voyage en solitaire ou quasi, on retrouve des aires gorgées de camping-caristes qui passent l'hiver au chaud. Parfois, nous fuions ce flux, bivouaquant entre criques et marais ou au bord d'un canal, avec vue sur la ville illuminée. Avec des épisodes nocturnes pour le moins glauques comme cette mise à mort du chat que nous avions nourri la veille, par une bande de chiens sauvages. Mais la foule nous apporte aussi des avantages: des nuits en toute sécurité. Plus besoin de chercher l'endroit adéquat, ni trop fréquenté, ni trop isolé, plus besoin de ne dormir que d'une oreille.


Salema
Lagos
Sagres.
Le soleil brille à nouveau sur ce gros village situé à l'extrême ouest de l'Europe. les ruelles sont étonnamment désertes, seuls quelques ex-soixante-huitards installés dans leur solitude traînent dans les cafés. La foule se concentre sur le bords des falaises du Fort de Sagresh et du Cap Saint-Vincent.


Sagres



Les balades le long des falaises sont impressionnantes et parfois périlleuses, les bords étant fragilisés par l'érosion. Les pêcheurs téméraires, en équilibre sur une pierre, cent mètres de vide et de vertige sous les pieds, nous impressionnent.

Cabo de Sào Vicente




Au Cap St-Vincent, nous retrouvons Gilles, Inès, Pascaline et François. Une semaine d'apéros, de repas, d'échanges, de jeux pour les enfants, entre pluies et éclaircies. Une semaine de rires ponctués de quelques balades et visites.
L'ouest de l'Algarve, authentique et sauvage, aux villages de pêcheurs encore épargnés par le sur-bétonnage de la côte laissent place peu à peu à une enfilade de stations balnéaires.
Salema










Pointe de la Pièté

Petite incursion à l'intérieur des terres, à Silves, jolie bourgade aux influences maures, qui s'offre une deuxième vie pour ne pas dire jeunesse en hiver grâce à la centaine de camping-caristes retraités répartis dans les parkings de la ville...


Silves
Il est déjà temps de prendre congé des Belges. Il nous faut poursuivre la route, une surprise nous attend à Faro, une autre à Cadiz. Les filles sont tristes. Mais qui sait? Peut-être que nos chemins se croiseront à nouveau sur les routes de l'Europe de l'Est? Pour l'heure, nous mettons le cap sur l'Espagne, puis l'Italie, tandis qu'ils se dirigent vers la Sierra Nevada avant de filer au Maroc pour passer l'hiver.

Cap sur Faro, au travers d'une campagne luxuriante piquée d'amandiers, d'orangers, de mandariniers et de citronniers.
Le Ria Formosa et ses marais salants nous hâppe le temps d'une balade ornithologique, les uns cochant les raretés tandis que les autres fouillent taillis et arbustes à la recherche du caméléon européen. En vain... 
Les avions rasent les eaux saumâtres du Ria. Chic! C'est pour demain!


Almancil
"Carte postale"
Ria Formosa, Faro







Faro

Demain est là, arrive avec le TAP de 16h10 Jean-Paul Frutig ou grand-papa, nous frôlant quasi à l'atterrissage alors que nous le guettons sur une butte jouxtant la piste.
Il débarque le sac plein de gentils messages, bricolés, écrits ou cuisinés, de cénovis et de soleil. Du vrai, cette fois-ci! Pas seulement celui du cœur!
Les filles sont ravies de retrouver leur grand-papa et, avec lui, des bribes de Crissier. Elles se l'accaparent, entre balades ornithologiques dans le Ria Formosa-Est (toujours pas de caméléon!), baignades du genre dernière du mois mais pas de l'année dans les eaux revigorantes de l'Océan, marchés de fruits et de légumes, marchés de poissons le nez pincé, flâneries dans les villages aux influences maures, apéros et repas tardifs dans la chaleur toute relative de Caracol.

Olhào




moulin à marées

Ria Formosa, Fuzeta
Spatule blanche
Aigrette garzette
Baignade à la Praia de Manta Rota




Un dernier apéro avec Huguette et Giovanni que nous croisons à nouveau par le plus grand des hasards, à Castro Marim, à un jet de pierre de la frontière espagnole.
Une dernière balade dans les ruines du château, une vue splendide sur les marais environnants et le malheureux Pont d'Espagne qui nous obligera tantôt à quitter le Portugal, un dernier clin d'œil à ce dédale de ruelles brodées de maisons blanchies à la chaux....
Et il est déjà l'heure de basculer de l'autre côté de la frontière, nostalgiques, laissant derrière nous une langue aux accents romanches charmeurs, des gens simples et chaleureux, un pays encore solidement ancré dans ses traditions et ses terres -bien que bordé d'océan. 
Des paysages variés et sauvages, entre terre et mer.
Des villes toutes de faïences, des monuments vibrants d'Azulejos, à l'intérieur comme à l'extérieur. 
Un pays en devenir, au passé d'une richesse extraordinaire.



Avec leur copine Nelly

Castro Marim





Difficile de quitter le Portugal. On aurait pu y rester encore des mois. Mais on a nos garde-fous. Que nos flâneries en Europe ne se limitent pas à l'Ouest. Un rendez-vous le 15 décembre à Barcelone, un autre autour du 20 dans les Pouilles, en Italie. 
Nos derniers rendez-vous posés. Après, on verra bien où nous mènera le voyage... 

Les passages en Espagne ne nous réussissent pas. L'arrivée à Cadix est aussi tourmentée que notre entrée à Sans Sebastiàn il y a deux mois. Une déviation inopinée nous envoie valser dans le dédale des ruelles pavées de la vieille ville. Venelles étroites, virages à angles droits... Les klaxons fusent, les andalous crient après ces crétins de touristes qui pénètrent la cité avec leur engin grotesque, puis fustigent celui qui nous vient en aide pour finir par s'engueuler parmi car il faut aller à droite, mais non c'est à gauche, mais bien sûr que non, c'est tout droit. Et on s'énerve, et on se vexe, et on élève la voix, on parle avec les mains, dans une ambiance très théâtrale. Jusqu'à ce que nous disparaissions au coin de la rue, derrière notre guide inespéré, tandis que les badauds finissent de se crier dessus. Le tout avec pour toile de fond une bonne drache -pluie belge, c'est dire!, un tonnerre tonitruant et des éclairs aveuglants.
Épuisés, nous nous attablons enfin à 22 heures devant un tendre steak portugais, houspillés par la tourmente qui ne nous lâchera plus de la nuit. Bien malgré nous, nous reprenons subito pronto le rythme espagnol, qui nous allait si bien au nord....


Les filles sont à la fête. Elles passent non seulement quelques jours heureux avec grand-papa Jean-Paul, mais elles retrouvent également sur les quais de Cadiz, devant leur monstre marin, grand-maman Caroline et grand-papa Franz. En route pour le Brésil, ils font escale dans la plus vieille ville de l'Occident. Une belle journée de retrouvailles, entre brèves éclaircies et pluies diluviennes, secoués parfois par des vents de plus de 180 km/heure. Au crépuscule, petits yeux humides et parfum de nostalgie pour les filles qui les voient repartir déjà. Et avec eux tous les précieux moments partagés dans leur jardin, en montagne et au bord du lac Léman.








Heureusement, elles gardent encore grand-papa Jean-Paul quelques jours dans leur maison. Il se plie en quatre pour entrer dans la couchette, se fait battre à plate couture au bataflash, leur fait l'école pendant les trajets, les initiant à l'économie avec tu te rends compte maman ce sont des vrais euros! Le soleil qu'il avait emmené dans ses bagages est déjà épuisé. Jean-Paul nous accompagne encore deux jours dans le froid et la grisaille sur les routes de l'Andalousie, en Espagne, à travers la Sierra jusqu'à la magnifique ville de Ronda. C'est à Antequerra, après une invitation à un repas de rois à "La Reina", qu'il embarque pour Malaga, où l'attend son avion pour la Suisse. 






Caracol et la vie à bord.

Caracol, va bien, malgré ses bobos passagers. On a toujours autant de plaisir à vivre dans cette maison mobile, plus souvent dehors que dedans. 
Au sud du Portugal, très fréquenté en hiver par les retraités en mal de soleil, se recréent sur les aires des mini-sociétés, regroupées en communautés linguistiques. Nous-mêmes nous prêtons avec plaisir au jeu de l'apéro, claquant notre porte pour nous en aller flirter chez les voisins avec une bouteille de Porto. Moins romantiques qu'une plage de sable au soleil couchant, ces aires ont au moins le mérite de nous offrir des nuits en toute sécurité, en plus d'être gratuites.
Le gros avantage du camping-car est incontestablement l'autonomie qu'il nous procure.... et la possibilité de voyager petit budget grâce au logement la plupart du temps gratuit. Le revers de la médaille: enfermés dans notre carapace de tôle, les rencontres avec les gens d'ici sont moins faciles et moins spontanées qu'à vélo. Nostalgie... C'est qu'on est trop autonome, dans notre Caracol! Et avec ça, on traîne encore une image bidochonne sculptée par des décennies de camping-caristes, pour le meilleur et pour le pire. Mais les rencontres sont belles aussi, faites d'une kyrielle de petits moments, au détour des chemins, dans un bar, dans le métro. Les uns partageant avec nous leur expérience Suisse, la décision de leur retour au pays avec des enfants pré-ado, les autres nous faisant cours d'histoire, des grandes découvertes au Portugal d'aujourd'hui, durant la demi-heure de trajet de métro. Ou partageant avec nous leur soif d'une vie différente plus paisible, et leur projet de tout abandonner et de se retirer dans une communauté dans les serras  portugaises: vivre en autarcie, assumer la scolarisation des enfants et se détacher de tout confort et toute technologie.
Des gens chaleureux. Des histoires de vie...


Dans les divers...

Beau, splendide, merveilleux, magnifique, pittoresque, éblouissant, éclatant... nous arrivons gentiment à court de synonymes.
Zoé s'est découvert une passion subite pour le poivron qui rougit devant ses ardeurs.
L'école suit son chemin et nous le nôtre...
À force d'écrire sur le dos, le ventre et le plafond de la capucine, en attendant que les marmottes émergent le matin, Loïse a décroché la lecture.
On mesure le temps qui passe aux ongles qui grandissent et aux racines qui poussent gris.
Notre casserole antique fonctionne à merveille. Gâteaux, pain, tresse et même de succulentes lasagnes maison. Quelle fête!
Malgré ses traits lamentables et affaissés, la pizza Caracol au petit épautre était quand-même une réussite! 





Notre premier contact avec le Portugal s'est fait au rayon pâtisseries du marché de Barcelos. Nous passons la frontière la bouche pleine... de douceurs. Ce doit être le pays qui compte le plus de boulangeries-pâtisseries au mètre-carré par habitant.
Le prix des pâtisseries et du pain (par ailleurs délicieux et très varié) ne nous incite guère au régime. 
Quelques chiffres. Avec 1 euro, on prend le petit déjeuner à quatre, avec 2, on peut garnir généreusement la table de pain et de ballons divers. Un café coûte entre 30 et 50 centimes d'euros. Une pâtisserie entre 20 et 60. Un dîner dans un resto populaire, entrée, repas, dessert vin et café compris coûte entre 6 et 8 euros.
Le soleil a continué à briller jusqu'au 8 novembre, les rares pluies s'épanchant la nuit. Un sans-faute. Ou presque. La pluie s'est pointée avec le froid en même temps que nous avons perdu notre fenêtre... et notre natel par la même occasion, avec tous les numéros bien sûr. Désolés donc pour les messages passés et futurs sans réponse.
Alors que l'Algarve était une valeur sûre question météo, nous avons été plus souvent inondés que baignés de soleil.
A force de vivre dehors, par tous les temps, les microbes s'épuisent. Plus de brassages, plus de rhumes, ni de bronchites, d'angines ou de gastro. Mais les vers sont sans doute à la fête....

Et le temps file.... On a beau en avoir à profusion, on se surprend encore à dire "quand on aura le temps....", ou "si on avait le temps...". On n'en a donc jamais assez.
Mais au moins, il est malléable, souple, vide... et à la fois tellement plein. Vide de contraintes, plein de tout.
Et quoi de plus jubilatoire que de voir s'afficher sur l'écran de la tablette, jour après jour.
"Vous n'avez rien de prévu pour demain"...