samedi 14 mars 2015

Péloponnèse

Calimera! Yasas! Bienvenue en Grèce!

Nappe blanche pour notre somptueux souper de la St.-Valentin, alors que nous voguons au large.


Nuit blanche, ou presque, chahutée par les remous et le moteur qui éructe tout comme le haut parleur enjoignant, au milieu de la nuit, à l'escale d'Igoumenitza, VD 561208 de déplacer son véhicule.

Montagnes blanches, alors que nous approchons de la côte et frôlons les îles. Des pics à perte de vue. Une Grèce loin des clichés. Jamais on n'aurait imaginé ça!


 

  

Délicieux plongeon dans cette nouvelle culture, avec ce mélange d'excitation et d'appréhension devant l'inconnu. 

La vie, indubitablement, se complique, une fois la frontière franchie....

 

Loïse le résume parfaitement bien, au terme d'une lecture bien maîtrisée de Petzi en Chine: "Ouf, on est sauvé en Grèce, parce que vous parlez bien le chinois!".

On laisse derrière nous la charmante vétusté des villes italiennes, mais aussi ce petit brin de folie tellement attendrissant qui agite la botte.

Les maisons sont coquettes, des tuyaux d'eau ornent toutes les terrasses, ce qui, en passant, nous facilite la vie. Les gens ripolinent balcons et trottoirs.

Yasas, andio, efaristo, parakalo, pos sas le-ne? Me le ne Zoé, me le ne Loïse.
Bonjour, au revoir, merci, s'il vous plaît, comment vous appelez-vous? Je m'appelle.... 
Cours de langues pour notre première soirée sur sol grec, avec en arrière fond sonore les chants croisés des Petit-Ducs, dans la gare pittoresque de Diakofto.

Un petit train nous emmène, à l'aube, à Zahlorou, au travers des splendides gorges de Vouraïkos, taillées, selon la légende, par un Hercule éperdu d’amour tentant de se frayer un chemin jusqu'à sa belle, au bord de la mer. Un petit village -40 habitants- encore endormi dans le givre matinal. Un froid vif. Un café grec fumant en train de décanter. Une balade insolite sur douze kilomètres de voie ferrée, dans un défilé impressionnant de roches, au travers de tunnels tortueux, sur des ponts vertigineux enjambant des torrents furieux... pour se travestir en fin de course en plaines de Far-West ocre et douces, avant de rejoindre oliviers, avocatiers et citronniers, jusqu'à la petite gare de Diakopto, où nous attend Caracol.












Premières courses sur sol grec au retour des gorges. Un moment à chaque fois palpitant. 
On voyage aussi à travers la nourriture, les saveurs et senteurs nouvelles. Tahin, pâte de sésame sucrée, halva, et même les premiers loukoums nous propulsent aussitôt dans la voisine Turquie. Les rayons de pasta laissent place à un frigo entier de féta aux emballages multiformes et déclinés dans toute les couleurs de l'arc-en-ciel. Les yogourts grecs onctueux se partagent le reste de la chambre froide. Les farines et les céréales se servent au poids, l’achat de légumes devient un vrai casse-tête, on se surprend à nouveau apprentis lecteurs, à mémoriser les  «hiéroglyphes » indéchiffrables, essayant vainement de les repérer ensuite sur la balance. On ne comprend strictement rien à rien.


Les séances de vocabulaire se multiplient le soir, les mots se perdent là où on ne peut plus les atteindre passé la quarantaine.... On intègre ce qu'on peut, on s'obstine, et finalement, le miracle se produit. On baragouine et on déchiffre... un tout petit peu, rien qu'un tout petit peu.

Une brève escapade sur une route étroite et tortueuse, un col à plus de mille mètres, ceint de pics immaculés, la mer turquoise à l'horizon. Et au bout, Kalavryta, petite bourgade tranquille décimée par les nazis, lors de la seconde guerre mondiale. Une jolie place pour Caracol sur la voie du petit train Diakopto-Zahlourou-Kalavryita. Terminus.



C'est la neige qui nous réveille à l'aube. 756 mètres et un mercure ne dépassant guère les -2° celsius en pleine journée. Le ciel se dégage à midi. Virée luge à la station de ski voisine. De toute façon, nous voilà bloqués dans le village, les deux seules issues passant par des cols à plus de mille mètres.



Mont Helmos. On se croirait chez nous, n'étaient les consonances peu helvétiques des conversations et les enseignes alphas betas gamas. Le froid est encore plus vif qu'à l'Etna. Le thermomètre, qui affiche -8°, sans compter le vent une fois de plus tempêtueux, a raison de notre tenue inadaptée. La partie de luge se termine très vite dans un Carcaol chauffé à bloc.





Réveil glacé suite à une panne de chauffage. La journée du 19 commence en beauté, la balade dans le Jura grec se poursuit sur le même ton. 

 




Une côte de bœuf en croûte de pistache et un gâteau plein de sourires clôt cette parenthèse suisse.



 

C'est le moment de descendre et retrouver un peu de chaleur.
Peu de kilomètres nous séparent de la côte, mais sur ces routes tortueuses, on ne dépasse guère le 40 km/h de moyenne. Quand ce ne sont pas les éboulements ou les affaissements qui nous freinent, ce sont les troupeaux de chèvres espiègles qui nous bloquent. Et on rejoint plus que jamais, sur ces routes imparfaites, l'essence même du voyage, ce temps, souple et malléable, qui s'étire à l'infini, sans objectif pour l'arrêter et le rendre du même coup agressif.





Cap sur Olympia. Site majeur de l'Antiquité grecque, qui a connu son apogée en 576 av. JC. 
Berceau des actuels Jeux Olympiques, dont la flamme, tous les quatre ans, est ravivée et transportée par des athlètes jusqu'à la ville accueillant les jeux.
Belle journée printanière à plonger dans l'histoire et les iris, coquelicots et marguerites égayant le site.






 



Cap sur la Messénie. La route est magnifique. Le Péloponnèse tout simplement époustouflant. Berceau de la mythologie grecque, constellé de sites issus des légendes, il nous injecte du rêve en plein jour. Terre d'oliviers piquée de montagnes blanches, marron ou ocre, extrêmement sauvage, peu habitée, plantée de dizaines de troupeaux de chevrettes et de quelques villages esseulés qui nous rappellent nos vagabondages en Turquie, douze ans auparavant. Même atmosphère au petit matin, chaussés d'hiver et coiffés de soleil cru, dans les brumes se mêlant aux feux de tourbe égayant les premiers pas du jour.

Bivouac dans le petit port de Pylos, une des sept cités qu'Agamemnon aurait offertes à Achille, à regarder tomber la pluie, plonger dans le monde fascinant des cités englouties et de la vie de châtelains, et dans la terrible bataille navale de Navarino, guerre d'indépendance qui a secoué les flots à la fin du XIXe.
La lagune de Gialova, dominée par les ruines du Paleokastro, château de Navarino, nous offre une belle balade ornithologique. Flamants roses, grandes aigrettes, bécassines des marais, martins-pêcheurs, busards des roseaux, bouscarles ou cisticoles animent bancs de sable et roseaux.

 









Cap sur le Magne.
« La péninsule du Magne baigne dans une atmosphère unique en Grèce. Durant des siècles, les familles en conflit y ont appliqué leurs propres lois, donnant naissance à une culture singulière. Les sentiers et les paysages du Magne font aujourd’hui rêver les randonneurs du monde entier. Ce petit coin du Péloponnèse mérite qu’on s’y attarde, avec ses hauts plateaux rocheux et ses oasis de végétation, ses tavernes de pêcheurs et ses austères maisons-tours fortifiées. » L planet
Il n'en faut pas plus pour qu'il atterrisse aussitôt dans nos " incontournables".

Des petites routes en mauvais état mais flanquées de paysages d'une beauté étourdissante nous baladent le long de la côte et dans les montagnes. Tout simplement fantastique, splendide, grandiose... les mots nous manquent.

Et soudain, un petits joyau sur lequel on bute, sans rien attendre.
Kardamyli, cernée de criques sauvages, dominée par des montagnes abruptes séparées de la mer par une barrière de maquis odorants.
Une belle plage tourmentée par des vagues énormes nous accueille. Quel meilleur endroit pour passer la nuit?
Les balades se succèdent sur les collines environnantes. Des hameaux perdus et quasi déserts nous surprennent au détour d'un sentier, des gorges profondes et chevelues, à la végétation inextricable qui prend des allures de jungle, après les averses qui nous précèdent, des jolies petites églises orthodoxes toutes de pierres, des crêtes blanches découpant les nuages au-dessus de villages lointains, des points de vue mirobolants sur les eaux turquoises, des odeurs de maquis entêtantes qui sentent le gigot d'agneau et le tian de légumes.

Balade le long de la plage...







Kardamyli - Agia Sofia - Vieux Kardamyli














Ruine de Malta, à travers les maquis




Les hauts sommets de la chaîne des Taygètes ne se laissent cependant pas facilement dompter. Encapuchonnés de blanc, goguenards, ça fait quelques jours qu'ils nous font de l'œil, entre deux chassés-croisés de nuages. Malheureusement, ils restent enfermés dans leur voile gris sombre, et protègent jalousement leurs gorges et sentiers alpins d'intrusions étrangères.


Nous faisons route vers le sud.

Le petit port de Géroliménas, hameau de pêcheurs de 55 habitants, nous accueille pour la nuit. Ses environs balayés par le vent, piqués de tours en ruines nous propulsent dans la mystérieuse Écosse.




Cap Tenaro. L'un des points les plus méridionaux d'Europe continentale. Evoqué par Homère comme l'une des portes des Enfers.
Rien d'infernal, mais des allures de bout du monde. Les hameaux passent de 50 à une poignée d'habitants, des tours en ruine jalonnent notre route. Tout n'est que rudesse autour de nous. Le paysage, dégarni, aride, dur. Les habitants, tannés, isolés, durs. Vathia, élégante sur son éperon rocheux, sort du lot avec ses maisons fortifiées pour la plupart rénovées.

Vathia




Jolie balade jusqu'au phare du Cap Tenaro, 200 ème pique-nique ou à peu près sur nos 200 jours de voyage. Olives de Kalamata, avocats de la région, féta, concombres.... avec devant nous l'immensité.
Les filles retrouvent avec plaisir leurs jeux de mer et chasses aux crabes qui les ont tant accompagnées sur le début du voyage.


Porto Kagio


Cap Tenaro



Géroliménas, pour une seconde nuit, heureusement moins tourmentée que la précédente, la mer chatouillant nos orteils.
Grand moment dans la petite Taverne du coin, enfumée. Tzatziki, pain à l'olive et à l'ail grillé au feu de bois qui crépite dans la pièce, féta grillée, chou farci au riz et ragoût fondant, pêchée de petits poissons grillés, patates frites maison, salade tiède de légumes verts au citron, que la cuisinière vient de cueillir dans le potager, le tout gorgé d'une bonne huile d'olive. Premier éventail de spécialités grecques.... Quel régal. Une cuisine simple mais authentique! 





Aréopolis. La plus grande ville du Magne, avec ses 800 habitants. Jolies maisonnettes et églises de pierre. Une belle balade nous emmène au travers de champs d'oliviers égayés de fleurs multicolores jusqu'au hameau de Sotiras où s'égosillent un coq et les chiens de garde. Une belle femme souriante et volubile, au visage zébré de rides, nous fait la conversation et nous montre d'un geste vague, le sentier, qui serpente jusqu’à une petite chapelle là-haut, tout là-haut.
La montée se fait d'une traite, raide et difficile. Le sentier, peu entretenu, disparaît dans des amas d'épineux quasi infranchissables. On quitte peu à peu la végétation méditerranéenne de bord de mer pour une sente alpine taillée dans la roche. En arrivant au sommet, effrangé par des lambeaux de brouillard, on se perd un instant, la boussole interne s'affole, Suisse ou Grèce, non, ce n'est pas une cabane mais une église orthodoxe aux allures de cabane. Loïse, qui se fait avoir aussi, lâche un sanglot au terme de l'équation montagne = grand-papa et grand-maman. Le brouillard se dissipe, les doutes aussi, sur un par-terre bleu turquoise constellé de lagunes.
Tout simplement féerique.... mais terriblement froid.
On termine la balade sur un brin de conversation avec le berger de Sotiras, sceptique, qui tour à tour regarde les filles, puis la chapelle à peine visible sur le sommet, et essaie tant bien que mal de faire le lien. Ici, on marche par obligation, fatalement, quand on a une douzaine de chèvres à faire brouter.

















Nous quittons Aréopolis au coucher du soleil. Cap sur le Magne laconien, et un des rares campings de Grèce ouvert, pour recharger les batteries, faire une machine, trier quelques photos, préparer pizzas et pain à l'épeautre, et caracoler sur la plage.







Trois jours au lieu d'un... Difficile de s'arracher à cette pause bienvenue, inondée de soleil, la Mer Egée bruissant à nos pieds.

Cap sur Sparte. On quitte le Magne pour la Laconie... d'où nous vient le terme "laconique", en lien avec les habitants qui étaient réputés avares de paroles.
Au terme d'une nuit pluvieuse, il ne nous faudra pas moins d'une demi-journée pour désembourber Caracol, finalement tracté par un tracteur peu enclin à traîner sous ces trombes d'eau. Nous arrivons juste à temps à Mystra, importante capitale culturelle de l'Empire byzantin, pour admirer les vestiges des églises, couvents, monastères et palais qui s'étagent sur un à-pic rocheux dominé par le massif des Taygètes. Les fresques byzantines, splendides dans leur fragilité, nous ébranlent. Vue sans doute sublime sur les oliviers de la Laconie et les amandiers en fleurs, mais l'orage qui nous bouscule durant toute la visite et transforme le sentier en torrent de boue ne laisse guère de temps à la contemplation.






Nauplie. Nafplio. Jolie ville vénitienne en bord de mer, dominée par l'imposante citadelle de Palamède. Cette forteresse du XVIIIe, qui renferme un ensemble de bastions indépendants, nous offre une vue imprenable sur la Mer Egée et la chaîne des Taygètes, une fois de plus coiffée d'orages.




Dès lors, notre horizon se remplit de vestiges plus parlants les uns que les autres, parfois vibrants d'un passé presque palpable. Ils nous en racontent, des histoires! Et nous séduisent autant par la faune et la flore qu'ils abritent, par leur situation exceptionnelle en amont d'une nature resplendissante que par la beauté du témoignage de leur temps passé.

Mycènes. Un des sites incontournables du Péloponnèse, avec Olympie et Mystra. Des hordes de visiteurs alors que jusque là on se croyait seul au monde. Les ruines du Temple d'Agamemnon dominent un panorama grandiose. Nous voilà aussitôt plongés dans le destin tragique de ce grand roi revenu vainqueur de la guerre de Troie, puis assassiné par son épouse Clymnestre et son amant à son retour. Son tombeau, imposant, ressemble à une ancienne ruche en osier, d'où son nom: tholos, tombe en ruche. Et comme à chaque fois, nous ressortons du musée, ébranlés par la folle ingéniosité de ces peuples qui 1500 ans av. J.Ch., outre les temples et édifices imposants, créaient bijoux, figurines, jouets articulés en terre, ustensiles de cuisine et de travail. Emouvant, même pour les historiens plus qu'amateurs que nous sommes. Même pour les filles, qui se prennent au jeu.





Une route de campagne truffée de nids de poule, à travers le magnifique paysage viticole du réputé vin de Némée, nous mène jusqu'à Corinthe.

Alors que les pluies se déchaînent sur la Turquie voisine et l'Europe, le temps chez nous oscille entre été et hiver, et passe des plus grandes chaleurs à des coups de froid mordants en une seule journée. Il reste néanmoins sec.
Les vestiges de la Corinthe antique, reconstruite par Jules-César, nous replongent dans l'époque romaine et leurs constructions mégalomanes, à l'exception du Temple d'Apollon, qui date du Ve siècle av. J-Ch.



L'Acrocorinthe, magnifique acropole de la cité ancienne culminant à près de 600 mètres, nous accroche à tel point qu'il nous faut dévaler au pas de course les sentiers bucoliques, pour atteindre la sortie avant que les herses ne se referment sur nous. Joyeux embrouillamini de styles et d'époques différentes, de la chapelles byzantine à la mosquée turque en passant par le rempart romain et vénitien... Nous en garderons l'image d'une balade passionnante à travers les âges, sur un piton rocheux tissé d'une végétation aux tons verts flirtant avec les jeux de lumière.... les oliveraies à nos pieds, la mer Ionienne et la mer Egée s'unissant dans les nonante mètres de profondeur creusés à même la roche du fameux canal de Corinthe.








Arrêt obligé pour voir de plus près cette oeuvre incroyable permettant d'unir les deux mers...
Le Canal de Corinthe.

Trois hauts murs ourlés d'une haie d'immeubles aux vitres fracassées, mi-abandonnés, mi-habités, l'obscurité d'un quartier jouxtant le métro et le port, les bruits de la ville agressifs après un séjour tissé de silence dans un Péloponnèse apaisant... mais un sourire gigantesque et franc, de ceux qui illuminent les coins les plus sordides. Nous sommes dans un parking du Pirée, entre les mains chaleureuses de Marie.
Abordable pied-à-terre, sinon adorable, qui nous permet de visiter Athènes et sa fameuse Acropole, sur la ligne verte, à quelques arrêts de là.


Un coin de ciel bleu vissé au-dessus de la tête nous permet de flâner dans la ville avec la douce illusion de l'été, en attendant la prochaine incursion de l'hiver.

La ville, tentaculaire, grignotant peu à peu les collines environnantes pour absorber ses quatre millions d'habitants, s'est agrandie autour de sites passionnants, qui en plus de vibrer du passé dont ils sont chargés, attirent des gens du monde entier et apportent à la capitale un substitut de poumon plus qu'agréable.
On retrouve la foule. L'Acropole, juchée sur une colline, semble flotter sur un océan de bitume. 

Flâneries au travers de magnifiques vestiges du temps passé....
Le Parthénon, érigé en l'honneur d'Athéna, déesse de la sagesse, fille de Zeus et protectrice de la cité, qui fit don aux Athéniens de l'olivier, symbole de la paix et de la prospérité,  leur garantissant par là-même nourriture, huile et bois.
L'odéon et le théâtre de Dionysos aux sièges sculptés dans le marbre, agréables dans la chaleur retrouvée.
Le temple de Zeus olympien et le stade des Panathénées qui accueillit les premiers jeux olympiques modernes, isolés dans leur flaque verte et leur forêt de pins, et qui nous font de l'oeil déjà du haut de l'Acropole. 

Le somptueux musée de l'Acropole, savamment pensé par l'architecte suisse Bernard Tschumi et son confrère grec a fasciné les filles autant que nous, avec ses nombreuses statues, le zizi des éphèbes, la frise monumentale du Parthénon, l'origine des peintures utilisées à l'époque et l'excellente tarte à la féta de la cafète avec vue sur l'Acropole.

Temple de Poséidon


Parthénon


Odéon d'Hérode Atticus

Théâtre de Dionysos
 

Temple de Zeus olympien 

Stade des Panathénées

Le lendemain, c'est au tour de l'Agora antique de nous offrir une belle balade au vert entre les vieilles pierres, jusqu'au splendide temple d'Héphaïstos.
Au loin, le temple d'Héphaïstos







La colline de Philopappos nous séduit par la vue stupéfiante qu'elle nous offre sur Athènes, loin de la foule, et par les créatures préhistoriques que nous y croisons.




Une pause moussaka avant de nous enfiler dans les ruelles bondées de Plaka et celles, animées, du marché aux puces de Monastiraki.


Athènes, ce sont aussi....
Des airs tsiganes qui gonflent dans le métro et emplissent la rame. Trois bambins échevelés qui grattent le bouzouki, font souffler l'accordéon et sonner leur voix pure d'enfants. Mélopées pleines de nostalgies qui donnent la chair de poule.

Des éclairs tagués qui tracent du Pirée à l'Acropole, à travers la ville et les ruines: les métros, bondés, rapides, efficaces, faciles.

Les routes et autoroutes surchargées dans le jour finissant, un ciel noir d'orage tendu devant nous. Le chaos, les motards sans casques qui slaloment à grande vitesse entre les voitures, la bande d'urgence qui devient la quatrième voie. Même les camions s'y mettent!

Les senteurs d'orient qui déjà déferlent, l'effervescence dans les ruelles, l'ambiance de souk qui nous envoie valser hors de l'Europe le temps d'une balade.
Pour la première fois, Zoé se sent vraiment dépaysée. "Ça ne ressemble plus du tout à Crissier!"

Malgré la vie palpitante des grandes villes, le melting-pot des cultures, des odeurs, des images, les terrasses et somptueux monuments emplis d'histoire, il nous tarde de quitter la ville.... et de retrouver une nature plus accueillante.

***
Nous avons à peine commencé à découvrir ce splendide pays, vagabondant entre les doigts et sur la paume du Péloponnèse, que déjà, nous sommes envoûtés. Pleine de contrastes, région arc-en-ciel, courant du déluge au soleil, des cristaux de neige aux amandiers en fleur. Sauvage, authentique, forte et rude, intense, aux saveurs et senteurs méditerranéennes qui se mêlent dans notre assiette, saupoudrées d'un zeste d'orient.
L'huile d'olive bio fraîchement pressée accompagne le moindre de nos repas. Les Dieux grecs et les récits de l'Odyssée nos veillées et nos « traîne-matins ». Homère veille sur nos nuits. On flâne dans un monde féerique entre passé et présent, réel et fiction.
Tout simplement magique!
Autant dire que nous risquons d'y caracoler encore quelques temps....

Plus que jamais, on flâne, on se laisse guider. Deux trois régions qui nous interpellent, avec comme thème récurrent la nature, la randonnée et l'authenticité, la vie, le quotidien, les gens... la marche étant notre moyen préféré pour découvrir une région. La vivre à un rythme lent... 
On se laisse le temps, on dérive, on avance. Les rencontres, la météo, les coups de cœur font le reste.

Magnifiques bivouacs en Grèce.
En montagne, les nuits sont glacées mais calmes, figées dans le givre du petit matin.
En plaine, elles sont chaudes, dans tous les sens du terme, surtout lorsqu'on s'aperçoit trop tard qu'on s'est posé sous les fenêtres d'une discothèque, un samedi soir.
Les plus belles resteront sans aucun doute celles passées sur la plage de Kardamyli, à la fois paisibles car coupées du monde, et agitées par le tumulte des vagues entraînant les galets dans leur folle danse. 



Ou la nuit presque blanche dans le petit port de pêcheurs de Géroliménas, secoués comme des oliviers par la tempête. Soulagés d'arriver au petit matin.



Des nuits mémorables dans des lieux enchanteurs. Le revers de la médaille pour Caracol: s'approvisionner en eau (ce qui ne pose aucun problème en soi étant donné le nombre de robinets extérieurs au km2), vider les eaux sales, mais surtout, les toilettes. Nous les utilisons le moins possible, retrouvons nos premières expériences d'il y a dix ans, avec notre vieux bus VW dans lequel Zoé à vécu ses premiers voyages.... et nous débrouillons comme nous pouvons quand ça commence à déborder. Dur dur de trouver des toilettes publiques, il faut parfois chercher longtemps, mais on finit toujours par trouver une solution. Une seule fois, nous avons dû, en dernier recours, souiller le tas d'immondices d'une décharge publique, déjà "chargée" de cadavres de chiens errants et étrangetés de toutes sortes. Donc pas bien méchant. Mais nous l'avons quand même fait sans grande conviction.

La saga des grands froids a continué à souffler et alimenter les conversations, au début de notre séjour en Grèce. Du jamais vu, nous assurent les badauds engoncés dans leurs multiples couches, et les épicières, bouchères, caissières disparaissant sous leurs bonnets de laine et leurs doudounes. C'est Kalavryta qui détient la palme de notre nuit la plus froide. Deux degrés, au réveil, alors que nous osons enfin émerger de nos couettes doublées de couvertures, après la panne de gaz de quatre heures du matin.
En bord de mer et dans les collines, nous retrouvons des chaleurs agréables. Les douze degrés au réveil qui nous effrayaient au début du voyage, nous paraissent maintenant drôlement chauds. Et dès que le soleil apparaît, le mercure grimpe, les pulls tombent…. et on se surprend à fricoter avec des températures estivales.
A l'heure qu'il est, après une parenthèse quasi estivale à Athènes, le mercure est retombé en-dessous de dix degrés, en pleine journée!

On se sent mieux que jamais dans les quelques mètres carrés de Caracol. L'espace restreint ne nous pèse plus du tout. l'Europe est tellement vaste...



On renoue en Grèce avec les tavernes enfumées et les effluves de cigarettes qu'on déménage avec nous dans le bus et qui nous rappellent nos jeunes années de fumeurs passifs....

Dans certaines régions rudes et retirées, les hommes sont de prime abord un peu bougons et intimidants. Mais il suffit souvent d'un "efaristo" ou d'un "yasas" prononcé timidement par les filles pour qu'ils se dérident et sourient de toutes leurs rides, les chargeant aussitôt de sucettes, bonbons et autres gâteries.

Depuis l'Italie, Loïse ne cesse de perdre les années que notre honnêteté toute suisse nous empêche de lui enlever. Au fil des contacts avec les employés des transports, que ce soit dans les métros, les bus ou sur les bateaux, elle continue de rajeunir. "Mais non, voyons, elle n'a pas cinq ans. Elle a quatre ans, n'est-ce-pas?" 

Notre cure de vitamines C continue. Les oranges pullulent, pourrissent bien souvent à l'arbre. Les habitants nous invitent gentiment à nous servir, pour notre plus grand bonheur.


Voilà bientôt 7 mois que nous sommes en route. Le temps à beau être élastique, il file aussi vite qu'en Suisse. On a basculé à l'est. Turquie, Albanie, Macédoine, Roumanie, Pologne, Slovaquie, République Tchèque, Hongrie, Serbie, Croatie, Slovénie.... Comment diable fourrer tous ces rêves dans les quatre mois qu'il nous reste? Plus que jamais, on va devoir faire des choix. Il nous faudrait au minimum deux ans.... et là encore, on n'en aurait pas assez. En a-t-on jamais assez, d'ailleurs?

Plus on avance, plus le temps s'étire, s'effiloche, nous emmène et nous emmêle. On reste accroché, comme un poil de biquette sur un barbelé. Extensible, souple, vide et plein à la fois, c'est comme ça qu'on l'aime. On s'en gave, on le rote, on s'en rempli, on s'en repaît. On ne le tue pas, oh non, surtout pas.
On essaie d'oublier qu'il n'est pas infini, on ignore ses râles ronflants alors qu'il commence à expirer, pour s'en aller épouser, cet été, le temps ordinaire. Celui qu'il faut rentabiliser à tout prix, celui qu'il ne faut pas perdre. Le temps qui est argent et qui n'est plus, simplement, espace, liberté, sérénité. Conscient de sa fragilité, de sa condition éphémère, on l'absorbe encore plus goulûment, à la manière des condamnés.

Yasas!